
Cette carte utilise la projection de Mercator, qui agrandit les zones proches des pôles et rétrécit celles proches de l’équateur.
la carte du monde est-elle fausse ?
La carte du monde telle que nous la connaissons, notamment celle affichée dans les écoles ou sur les murs, est en réalité une interprétation du globe terrestre. Elle repose le plus souvent sur une projection appelée Mercator. Mais cette projection est loin d’être neutre : elle déforme la réalité géographique de manière significative. Ce n’est pas que la carte est « fausse » au sens strict, mais elle ne montre pas fidèlement la taille réelle des continents et des pays. Elle donne une image biaisée du monde, souvent au profit de certaines régions.
la terre est une sphère, pas un rectangle
La Terre est presque sphérique, légèrement aplatie aux pôles. La représenter sur une surface plane, comme une feuille de papier ou un écran, pose donc un problème mathématique. Toute tentative de projeter la surface de la Terre en deux dimensions implique une distorsion. On ne peut pas « aplatir » un globe sans déformer certaines de ses caractéristiques : taille, forme, distance ou angles.
C’est là qu’interviennent les projections cartographiques. Chacune privilégie certains aspects au détriment d’autres. La projection Mercator, inventée au XVIe siècle par le géographe flamand Gerardus Mercator, a été conçue pour faciliter la navigation maritime. Elle conserve les angles, ce qui permet de tracer des routes droites sur l’océan. Mais elle déforme énormément les surfaces, surtout à mesure qu’on s’éloigne de l’équateur.
des exemples frappants de distorsions
Un des cas les plus célèbres de distorsion est le Groenland. Sur une carte de Mercator, il semble presque aussi grand que l’Afrique. Or, en réalité, la superficie de l’Afrique est d’environ [math] 30,000,000 , km^2 [/math], tandis que celle du Groenland est d’environ [math] 2,100,000 , km^2 [/math] : le continent africain est donc environ 14 fois plus grand.
Autre exemple : l’Europe semble plus imposante que l’Amérique du Sud. Pourtant, l’Amérique du Sud est presque deux fois plus grande en superficie.
Ces distorsions ne sont pas seulement des curiosités géographiques. Elles influencent notre perception du monde. Une région apparaissant plus grande peut paraître plus importante, plus puissante ou plus développée. À l’inverse, une sous-représentation peut donner une fausse idée d’infériorité ou d’isolement.
une représentation biaisée du monde
La carte de Mercator est profondément eurocentrée. Les pays d’Europe y apparaissent plus grands qu’ils ne le sont vraiment, tandis que les continents du sud global — notamment l’Afrique, l’Amérique du Sud et l’Océanie — sont compressés.
Ce déséquilibre n’est pas anodin. Il reflète une vision du monde héritée de l’époque coloniale, où les cartes étaient conçues par et pour les puissances européennes. Cela peut contribuer à perpétuer des stéréotypes et une hiérarchisation implicite des régions du monde.
Par exemple, une étude menée dans plusieurs écoles a montré que de nombreux élèves surestiment la taille des États-Unis ou de la Russie, tout en sous-estimant celle de pays africains comme le Nigeria ou la République démocratique du Congo.
quelles alternatives plus fidèles existent ?
Il existe d’autres projections cartographiques plus respectueuses des surfaces réelles. La plus connue est celle de Gall-Peters. Contrairement à Mercator, cette projection conserve les proportions de surface. Elle permet donc de mieux comparer les tailles des pays. Mais elle déforme fortement les formes, donnant des continents allongés et peu naturels à l’œil.
Une autre solution est la projection Authagraph, inventée par le Japonais Hajime Narukawa. Elle est considérée comme l’une des plus précises au monde. Elle divise la sphère terrestre en 96 triangles, qu’elle réarrange en un rectangle. Elle minimise la distorsion des surfaces, des formes et des distances. Mais elle est peu utilisée car elle perturbe les habitudes de lecture cartographique.
Enfin, certains outils numériques comme Google Earth permettent aujourd’hui de visualiser la Terre en 3D, avec des mesures beaucoup plus exactes, selon l’angle de vue choisi.
pourquoi continue-t-on à utiliser mercator ?
Malgré ses défauts, la projection de Mercator reste la plus utilisée dans les cartes classiques, notamment dans l’éducation. Elle est simple à lire, familière et cohérente pour certaines utilisations comme la navigation ou les applications web (Google Maps l’a utilisée longtemps).
Changer les cartes du monde revient à remettre en question une norme culturelle profondément ancrée. Pourtant, de plus en plus d’enseignants et de géographes plaident pour une révision des supports pédagogiques. Montrer aux élèves différentes projections permet de comprendre les enjeux derrière les représentations géographiques.
la carte du monde influence notre vision
Voir le monde à travers une projection biaisée, c’est aussi voir l’histoire, le pouvoir et les relations internationales sous un angle déformé. En donnant plus de place à certaines régions, on en réduit d’autres symboliquement. La géographie n’est donc pas neutre. Elle transmet des idées, même inconsciemment.
Connaître l’origine et les limites des cartes que nous utilisons est donc essentiel. Cela permet de développer un regard critique sur les représentations du monde. En somme, il ne suffit pas de savoir lire une carte : il faut aussi savoir ce qu’elle montre… et ce qu’elle cache.
En conclusion
La carte du monde telle que nous la connaissons n’est pas totalement fausse, mais elle est inexacte. Elle est le produit d’une époque, d’une technique et d’un besoin spécifique : la navigation. Aujourd’hui, avec les moyens numériques et la connaissance des biais historiques, il devient nécessaire d’élargir notre compréhension. En s’ouvrant à d’autres projections, on découvre un monde plus juste dans ses proportions, et peut-être plus équitable dans sa perception.