Le droit de grève en France : un droit constitutionnel
Le droit de grève est un droit fondamental reconnu par la Constitution française. Inscrit à l’article 7 du Préambule de la Constitution de 1946, il est aussi protégé par la jurisprudence et le Code du travail. Ce droit s’applique à tous les salariés, du secteur privé comme du public, y compris dans les petites structures. Il permet aux travailleurs de cesser collectivement le travail pour faire entendre des revendications d’ordre professionnel (salaires, conditions de travail, sécurité, etc.).
Qui peut faire grève et dans quelles conditions ?
En principe, la grève doit être collective et concertée, impliquant au moins deux salariés. Cela signifie que deux ou plusieurs personnes doivent s’accorder pour cesser le travail dans le but de porter des revendications professionnelles.
Mais la jurisprudence a reconnu deux exceptions majeures :
- Salarié unique : Lorsqu’un salarié est le seul employé de l’entreprise, il peut exercer seul son droit de grève.
- Appel à la grève national : Si un mouvement de grève est lancé au niveau national par une organisation syndicale, un salarié peut s’y joindre même seul dans son entreprise.
Ainsi, même dans une TPE (très petite entreprise), la grève peut être légale et protégée.
Comment une grève doit-elle être déclarée ?
Dans le secteur privé, il n’existe aucune obligation légale de prévenir l’employeur ou de déposer un préavis, sauf pour certains secteurs spécifiques comme les transports publics ou les hôpitaux. Le salarié n’a pas à fournir de justificatif, ni à prévenir à l’avance.
Dans le secteur public, un préavis de 5 jours francs doit être déposé par une organisation syndicale représentative.
Ce que l’employeur peut et ne peut pas faire
Faire grève n’autorise pas l’employeur à prendre des sanctions disciplinaires, ni à licencier un salarié pour ce seul motif. La grève est un droit, et tant qu’elle est exercée légalement, le salarié est protégé.
Cependant, l’employeur a tout de même des droits :
- Il peut effectuer une retenue sur salaire, strictement proportionnelle à la durée de l’absence (ex. : une heure non travaillée = une heure non payée).
- Il peut réorganiser le travail ou confier des tâches à d’autres salariés non-grévistes pour assurer la continuité de l’activité.
Que doit figurer sur la fiche de paie en cas de grève ?
L’absence pour fait de grève ne doit pas être mentionnée comme une sanction ou une faute. La loi interdit toute stigmatisation.
Sur la fiche de paie, l’employeur peut utiliser des formules neutres telles que :
- « Absence non rémunérée »
- « Retenue pour absence »
Important : le mot « grève » ne doit pas forcément apparaître sur la fiche de paie. Cette retenue est une simple conséquence de la non-exécution du contrat de travail pendant la durée de la grève.
Peut-on faire grève une seule heure ou une demi-journée ?
Oui. En France, aucune durée minimale n’est exigée pour qu’une grève soit reconnue. On peut faire grève :
- une heure,
- une demi-journée,
- une journée entière,
- ou même quelques minutes, si cela répond aux critères (revendication professionnelle, action collective ou encadrée légalement).
L’employeur pourra uniquement retenir la rémunération sur la période exacte non travaillée. Exemple : si vous cessez le travail pendant 2 heures, il ne pourra retenir que l’équivalent de 2 heures de salaire.
Quels sont les risques pour le salarié ?
En cas de grève légale, il n’y a aucun risque disciplinaire. Le contrat de travail est simplement suspendu pendant le temps de la grève.
Cependant, certaines conditions doivent être respectées :
- Les revendications doivent être professionnelles.
- La grève ne doit pas être violente ou abusivement perturbatrice.
- Elle ne doit pas empêcher les non-grévistes de travailler (pas de piquets bloquants ou d’occupation illégale de locaux).
En cas de dérapage, l’employeur peut entamer des procédures disciplinaires, mais uniquement pour des faits extérieurs au droit de grève.
Cas particuliers : grève et services publics
Dans les services publics (transports, éducation, hôpitaux, etc.), le droit de grève est encadré plus strictement :
- Obligation de préavis déposé par un syndicat représentatif.
- Mise en place éventuelle d’un service minimum (par exemple à l’école).
- Obligation pour les grévistes de se déclarer individuellement dans certains cas.
Ces règles visent à concilier droit de grève et continuité du service public.
En résumé : ce qu’il faut retenir
- Il faut au moins deux salariés pour faire grève, sauf exceptions légales (salarié unique ou appel national).
- L’absence est notée sur la fiche de paie comme « absence non rémunérée », sans mention du mot « grève ».
- Le salarié n’a pas à prévenir ni à justifier son absence (hors exceptions).
- L’employeur peut effectuer une retenue de salaire proportionnelle, mais aucune sanction n’est possible si la grève est légale.
En conclusion
Le droit de grève est un outil essentiel de défense des intérêts professionnels, accessible à tous les salariés, même dans les petites entreprises. Il est cependant encadré pour éviter les abus et garantir un équilibre entre droits des travailleurs et continuité de l’activité. Connaître ses droits permet de faire valoir ses revendications de manière légale et sereine.